2ème festival de films d'opéra, Opéra-Film-Art

2ème festival de films d'opéra

      Opéra-film-art

du 6 au 19 juin 2016


toutes les séances ont lieu au cinéma Le Balzac - 1, rue Balzac - 75008 Paris
tél : 01 45 61 10 60 - métro : Charles de Gaulle Étoile 

le 6 juin à 20h   Madame Butterfly de Puccini, film de Frédéric Mitterrand, séance présentée par Frédéric Mitterrand
le 7 juin à 20h Moïse et Aaron de Schönberg,  de Jean-Marie Straub et Danièle Huillet  précédé d’un entretien filmé inédit avec Jean-Marie Straub
le 9 juin à 20h   Khovantchina de Moussorgski,  film de Vera Stroeva
le 11 juin à 14h   La Belle Hélène d'Offenbach,  film de Stellio Lorenzi
le 13 juin à 20h30   Rigoletto de Verdi,  film de Carmine Gallone
le 14 juin à 20h30   Boris Godounov de Moussorgsky,
film de Vera Stroeva
le 16 juin à 20h   Soirée Opéra de Pékin : La Rose de Wouke
le 18 juin à 14h   Don Giovanni de Mozart, film de Joseph Losey
 CINÉ CONCERT :
le 19  juin à 20h30   Carmenfilm de Ernst Lubitsch (1919) 
accompagné au piano par PIERRE-ALAIN VOLONDAT 

avec le soutien de l'Ambassade de la Fédération de Russie,
ainsi que du Forum Culturel Autrichien, de l'Institut Culturel Italien, du Centre Culturel de Chine, du Goethe-Institut.

les films :

Puccini Madame Butterfly, réalisé par Frédéric Mitterrand (1995), avec Ying Huang, Richard Troxell, Ning Liang,  Richard Cowan, orchestre de Paris dirigé par James Conlon, 2h10
Avec une caméra tranquillement mobile, Mitterrand caresse ses personnages autant que ses paysages, qu’il compose alternativement comme des tableaux ou de fines cartes postales. Les gestes sont à peine plus appuyés que dans un film hollywoodien et le mélancolique passage du temps est illustré audacieusement par une séquence de vieux films en noir et blanc. Mitterrand restitue avec simplicité les différences d’âge, de cultures, de race et de classes sociales qui écrasent lentement la « poupée de porcelaine » de quinze ans, que Ying Huang incarne avec douceur jusqu’à son dernier regard qui voit brièvement l’au-delà..

Schönberg Moise et Aaron, réalisé par Jean-Marie Straub et Danièle Huillet (1974),

avec Günther Reich, Louis Devos, Eva Csapó, Roger Lucas, Richard Salter, Werner Mann, Orchestre de la Radio Autrichienne, dirigé par Michael Gielen, 1h45.

(le film sera précédé d’un entretien filmé inédit avec Jean-Marie Straub (8 minutes)
Fruit de quinze ans de patience, film sans prédécesseur ni successeur, Moïse et Aaron se nourrit d’un principe central qui donne à la caméra un rôle de protagoniste. Pour rivaliser avec elle, les chanteurs vont au bout de leurs forces, chantant sous le rude soleil des arènes des Abruzzes pour une prise de son en direct. Les exigences inexorables de Straub en matière de diction donnent une force inouïe à l’Opéra de la parole : l’adresse de Moïse à « l’irreprésentable Dieu » est le sommet d’expressivité que Schönberg a rêvé.

Moussorgski Khovantchina, réalisé par Vera Stroeva (1959),  avec Mark Reizen, Aleksei Krivchenia, Anton Grigoriev, Maïa Mlissetskaia, orchestre et choeurs du Bolchoï, dirigés par Evgueni Svetlanov, 2h10
Cinq ans après son fameux Boris Godounov, Vera Stroeva a saisi « l’opéra national russe » tel que l’on ne pourra sans doute plus jamais le reproduire. La caméra individualise puis réunit les visages d’un peuple simple, manipulé mais fort, qui passe en un instant de l’inquiétude à l’espoir. Quelques années après la mort de Staline, on sent que l’art permet tant aux solistes qu’aux membres du chœur, d’exprimer ouvertement le désarroi ou les ambitions que crée la fin relative d’une dictature. Svetlanov, âgé de trente ans, donne des couleurs splendides à la partition révisée par Chostakovitch et la danse de Maïa Plissetskaïa, jeune liane aux yeux immenses, ensorcelle le prince Ivan et les spectateurs.

Quiconque aime Offenbach se doit d’avoir vu ce film incomparable, malgré les défauts techniques du support de projection. A côté des d’Hélène et Paris, chantés par deux étoiles de l’opérette aux formes sculpturales, des comédiens chanteurs rivalisent de génie : Charron, Hirsch, Manuel, Sorano !…  Dans les décors de carton du studio Cognac-Jay, Stellio Lorenzi trouve toujours les gestes justes : l’entrée des rois de Grèce est peut-être le plus pur moment offenbachien jamais filmé. Le grand héros caché de cette aventure est cependant le chef d’orchestre Gérard Calvi, qui dirige l’orchestre avec un humour et une vitalité qui seront difficilement égalés.

Ce film très rare est une des plus belles adaptations d’un opéra de Verdi au cinéma. Dans un noir et blanc impitoyable, le montage serré crée des lignes géométriques de regards et de gestes qui nous emportent progressivement de la scène de théâtre jusqu’au coeur des émotions. Titto Gobbi est un Rigolettto encore jeune, loin de toute caricature, qui paie le prix terrible d’avoir joué le jeu social sans penser aux conséquences. Les amateurs se réjouiront de voir, remarquablement filmé pendant l’ouverture, le grand chef d’orchestre Tullio Serafin. C’est le seul document vidéo montrant ce maître de l’opéra italien.

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Moussorgski, Boris Godounov, réalisé par Vera Stroeva (1954), avec Alexander Pirogov, Nikandr Khanayev, Georgi Nelepp, Maxim Mikhailov, Ivan Kozlovsky, Larisa Avdeyeva
Avec  son Boris, Stroieva transforme le monde en un opéra aussi vaste que l’imagination. Nous croyons être assis au côtés du bouleversant innocent de Kozlovsky, au milieu d’une forêt de bras levés qui réclament du pain. Et lorsqu’il dit doucement qu’il ne peut prier pour le roi Hérode, on croirait que le monde entier a entendu son chuchotement, et le tsar Boris effrayé ne peut que se cacher son visage et se détourner lentement. L’année même de la mort de Staline, Stroeva nous plonge en apparence dans la Russie de l’an 1600, pour nous montrer un peuple généreux, porté par la foi, prêt à remettre en question l’autorité des puissants. La caméra saisit les regards dubitatifs du peuple lors de la profession de foi de Boris, et encourage les femmes à malmener les hommes. Le tsar criminel fuit la folie en s’enfermant dans les vastes architectures de ses palais et ses costumes magnifiques, pendant que l’innocent pleure la Russie affamée au milieu de l’incendie allumé par les luttes pour le pouvoir.


Soirée Opéra Chinois

La Rose de Wouke, film de Fang Ying (1963), avec Xin Fengxia, 1h53
« La Rose de Wouke » a grande une importance historique : c’est le dernier film d’opéra tourné avant la « révolution culturelle ». Cette histoire des amours - contrariées par sa famille - d’une jeune femme avec son cousin montre la virtuosité et l’aisance physique des interprètes de l’opéra chinois. Plus poétique et moins acrobatique que l’opéra de Pékin, cet opéra pinju a la saveur des pièces populaires qu’aucune reconstitution ne saura retrouver.

Mozart Don Giovanni, film de Joseph Losey (1979), avec Ruggero Raimondi,  Edda Moser, Kiri Te Kanawa, Kenneth Riegel , José Van Dam, , Teresa Berganza, John Macurdy,  Malcom King,  Chœur et orchestre de l’Opéra de Paris, dirigés par Lorin Maazel, 2h50.
Losey aborde Don Giovanni avec un pur regard de cinéaste, ignorant des habitudes
et des clichés de la scène, et invente des images saisissantes : Dona Anna, échevelée, affronte la pluie en chemise de nuit avant de se désarticuler à la vue de son père mort.
Losey ne craint pas les longs plans séquences, comme dans son traitement virtuose de l’air « Meta di voi qua vadano », soutenu par la haute taille et le rayonnement physique de Ruggero Raimondi. Sa caméra sait suivre les personnages avec une remarquable fluidité (citons la descente d’escalier par Leporello). L’alternance des scènes en extérieur ou en intérieur et surtout la géométrie de la Basilique palladienne et de la Villa Rotonda donnent au film une esthétique singulière qui fit sensation lors de la sortie du film, voici déjà plus de 35 ans.

Ciné-concert
Carmen, film d’Ernst Lubitsch (1918, noir et blanc),  avec Pola Negri, Harry Liedtke, 80 minutes, accompagné au piano par Pierre-Alain Volondat

Avec Carmen, Lubitsch offrit en 1918 à Berlin un de ses premiers grands rôles à Pola Negri, alors âgée de 21 ans. Joyeuse, sensuelle et juvénile, sa Carmen sait le prix du sexe, souvent lié pour elle et ses amies cigarières à l’argent et à la mort. S’il sait utiliser les dons exceptionnels de Pola Negri pour créer un personnage féminin d’une frappante modernité, Lubitsch montre en permanence son talent pour garder présente la dimension humaine tant dans les scènes de foule que dans les scènes intimistes. Pierre-Alain Volondat, un des plus grands pianistes français, accompagnera ce beau film en nous donnant sa vision de l’incomparable musique de Bizet.